OMUN : pourquoi ce webtoon est un mensonge

« C’était une aubaine. Une véritable aubaine, et au fond, je jubilais.

Combien de fois vous êtes-vous dits que votre vie était médiocre ? Que l’assoiffé d’aventures que vous étiez n’y avait pas son compte ? Que vous ne dépendiez que trop de votre culture, des opinions de vos proches, de la société elle-même, et que cela ne vous laissait que trop peu de temps pour acquérir votre identité propre ?

Que votre destinée était déjà toute tracée et que cela ne vous plaisait pas du tout ? »

Tu viens de lire un extrait du premier jet d’OMUN.

À cette époque-là, j’annonçais déjà la couleur : ce serait un récit d’aventure, d’évasion, d’action, qui parlerait de potentiel et de destinée.

En 2020, lorsque je ressors ma vieille BD des cartons, je la dépoussière, puis la publie sous forme d’épisodes, sur Webtoon Line, dans la catégorie « Canvas ». Comme ça, j’ai pu rendre mon histoire accessible à tous gratuitement (uniquement en français pour le moment).

Si j’ai amélioré la narration et les dessins, le fond reste le même : découverte, magie, combat… J’ai donc classé OMUN dans la catégorie « fantastique / action ».

Et pourtant, OMUN n’est que mensonges. Attention, je ne parle pas de retournement scénaristique de dernière minute du genre « en réalité, le protagoniste est dans le coma depuis le début ». Non. C’est bien plus grave que ça.

Myriam, Gaël et Jonas te mentent.
OMUN te ment.
Moi, Mokoya, je te mens.

J’ai commencé à écrire cette histoire en 2009.

Tout comme Myriam, Gaël, Jonas, ma vie prenait un tournant inattendu et je partais à la découverte d’un nouveau monde. Car c’est ainsi que commence OMUN : deux adolescents paumés, guidés par le troisième, se retrouvent piégés malgré eux dans une dimension dont ils ne maîtrisent pas les codes. C’est Jonas qui dirige la troupe. C’est lui qui leur parle du tournoi, c’est-à-dire leur seul moyen de rentrer sur Terre.

Mais toi qui fais probablement partie des initiés à l’univers d’OMUN, dis-moi, comment tu décrirais cette histoire à des amis ?

Ce que j’en dis en général, c’est : « Une histoire dans le genre isekai, avec un monde dans lequel il y a une sorte de magie. Il y a de la baston, et on parle d’amitié ».

En fait, ça sonne très « shōnen », non ? D’ailleurs, j’y pense, j’ai une petite checklist à respecter par épisode, où figurent entre autres critères :

• Découverte du monde et de ses règles
• Utilisations de pouvoirs (magie)
• Actions impliquant une mise en scène dynamique

Bon. Tout va bien alors. Si le cahier des charges le dit, c’est que c’est vrai.

Ou pas.

On a un monde avec des règles différentes du réel, des pouvoirs magiques… c’est plutôt évident, non ?

C’est vrai que d’après la vidéo de LinksTheSun sur les genres narratifs, OMUN remplit presque toutes les conditions :

• Magie
• Surréalisme
• Épée
• Pouvoirs surnaturels
• Transformation
• Et même le dernier, assez surprenant : « soulever quelqu’un dans les airs »

À noter que le genre défini par ces conditions est « fantasy » et non « fantastique », qui est un genre un peu différent. Links en parle d’ailleurs très bien dans sa vidéo. Malheureusement, si Webtoon [English] propose bien « fantasy », en français, la catégorie est devenue « fantastique ». Un abus de langage qui a le don de m’irriter… Mais passons.

OMUN n’est pas plus un webtoon « fantasy » qu’un webtoon « fantastique », de toute façon.

Si je me suis sentie obligée de faire cette fameuse checklist à respecter à chaque épisode, c’est justement parce que la magie d’OMUN est superficielle par rapport à ce que je cherche à raconter. C’est du cosmétique. De la poudre de perlimpinpin.

Du coup, tu te demandes peut-être pourquoi j’ai saupoudré mon webtoon de magie. Ah, peut-être pour ajouter un côté spectaculaire aux combats ?

…meh.

Sur les critères « action » de la vidéo de LinksTheSun, OMUN n’en respecte que la moitié, qui sont :

• Explosion
• Arts martiaux
• Combats à main nue
• Coups de poing
• « mec badass » (j’ai pas réussi à mieux traduire « tough guy », désolée)

Et encore ! On est léger sur certains points. En termes de structure narrative, on s’approche plus du genre aventure que du genre action (bref, je pinaille).

Sur 15 épisodes déjà sortis, on n’en compte que 6 avec des vraies scènes de baston : moins de la moitié. Connaissant la suite du scénario, je peux vous dire qu’au plus fort du tournoi, le ratio « épisodes de baston » ne dépasse jamais 60%. On est donc très moyen pour un webtoon catégorisé « action ».

Bonne question.

Qu’y a-t-il vraiment au centre d’OMUN, si ce n’est un nouveau monde, des pouvoirs et du combat ?

Pour l’instant, très peu de paysages pour découvrir cette autre dimension…

Pour l’instant, des pouvoirs auxquels on ne comprend pas grand-chose…

Pour l’instant, pas tant de scènes d’action.

Pourtant, une chose relative à ces trois points est énormément traitée dans OMUN : la réaction des adolescents qui doivent apprendre à jouer avec les nouvelles cartes qu’on leur donne.

C’est là tout l’intérêt de l’histoire : les personnages, et surtout, les relations qu’ils apprennent à tisser.

En réalité, OMUN ne parle pas de Myriam et Gaël partant à la découverte d’un nouveau monde, guidés par Jonas.

OMUN parle de comment l’amitié entre Myriam et Gaël, qui se dégradait progressivement à force de stagner, va évoluer.

OMUN parle de la nature de la relation naissante entre  Gaël et Jonas, que tout oppose.

OMUN parle de comment Jonas qui n’a confiance qu’en lui, et Myriam, qui n’a aucune confiance en elle, vont être amenés à se côtoyer.

Ce triangle qui se forme, se déforme, se fragmente, se reforme au fil des épisodes, est impacté par d’autres personnages qui, en tissant leurs propres relations avec le trio central, vont bousculer le fragile équilibre du groupe.

OMUN ne parle pas de magie et de combats.

OMUN parle d’introspection, de sociabilisation, de séquelles psychologiques et de reconstruction.

Maintenant tu sais pourquoi et comment je t’ai menti.

Reste à savoir pourquoi j’ai dit que Myriam, Jonas, Gaël, te mentent.

Reste à savoir pourquoi j’ai dit que OMUN te ment.

Pour cela, il va falloir lire les prochains épisodes…